Rêve canadien ou choc culturel ? Les épreuves des étudiants algériens au Canada

Lorsqu’ils quittent l’Algérie pour le Canada, des centaines d’étudiants algériens emportent dans leurs bagages des rêves d’ascension sociale et de réussite professionnelle. Cependant, la réalité les rattrape souvent. Entre obstacles bureaucratiques, hausse des frais de scolarité et conditions de vie précaires, beaucoup se retrouvent confrontés à une expérience bien différente de ce qu’ils avaient imaginé.
Des attentes élevées, une réalité décevante
« Les réseaux sociaux nous ont vendu une vie idéale au Canada« , confie une étudiante. Venue comme touriste avant de changer son statut pour étudiante, elle relate un parcours semé d’embûches : retards administratifs, coût exorbitant des études, et absence de transparence. Alors qu’on lui avait annoncé des frais de 24 000 $, elle se retrouve à devoir débourser bien plus, parfois sans justification claire.
Les étudiants étrangers paient parfois 10 fois plus que les Québécois pour la même formation. Et les conditions d’apprentissage ne suivent pas toujours : salles de cours sans lumière naturelle, manque de ventilation et horaires surchargés. « Un environnement stressant qui a déclenché des crises de panique chez moi« , raconte-t-elle.
Un cadre administratif rigide et confus et exploitation et abus financiers
Entre le gouvernement fédéral, le Québec et les institutions, les démarches d’immigration deviennent labyrinthiques. Des permis d’études retirés pour des raisons mineures, comme un dépassement horaire au travail, ou des délais interminables pour intégrer des écoles rendent le parcours difficile. Les étudiants sont souvent pris dans un cercle vicieux entre études et immigration, sans savoir vers qui se tourner pour une aide concrète.
Les étudiants étrangers sont parfois surnommés les « vaches à lait » des établissements d’enseignement. À cela s’ajoutent des abus d’employeurs peu scrupuleux, des arnaques immobilières et des frais faramineux pour des démarches administratives. Par exemple, un simple changement de statut peut coûter entre 4 000 et 8 000 $.
Un impact psychologique dévastateur
Selon des psychologues spécialisés, ces situations entraînent des conséquences graves sur la santé mentale des étudiants. Les étudiants étrangers au Canada font face à de nombreux défis qui peuvent affecter leur santé mentale. Selon le psychologue Jean Ramdé, professeur à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval, ces étudiants sont particulièrement vulnérables en raison de leur éloignement de leur culture d’origine et de leur réseau social et familial. Ils doivent s’adapter à un nouvel environnement, acquérir une nouvelle culture et apprivoiser un nouveau système d’enseignement, ce qui n’est pas évident et peut affecter leur bien-être mental.
De plus, la précarité financière oblige souvent ces étudiants à travailler pendant leurs études, tout en vivant dans des logements exigus. Ils ressentent également une pression de réussite, car leurs proches restés au pays ont souvent consenti de lourds investissements financiers pour qu’ils puissent venir au Canada et payer les frais de scolarité élevés. Cette situation peut entraîner un stress supplémentaire et affecter leur santé mentale.
Il est donc essentiel de reconnaître ces défis et de mettre en place des mesures de soutien adaptées pour aider les étudiants étrangers à surmonter ces obstacles et à préserver leur santé mentale.
Des réformes nécessaires
Les témoignages d’étudiants appellent à une refonte du système, notamment une meilleure régulation des consultants en immigration, une transparence accrue des établissements scolaires et une simplification des démarches administratives. Ces jeunes, qui apportent une richesse culturelle et économique au pays, méritent mieux que d’être abandonnés à un système qui semble les broyer.
En attendant, beaucoup continuent de se battre pour leur avenir, tout en espérant que leur expérience servira à alerter les décideurs.
Salima Sadi