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Le parcours inspirant d’Amokrane Mariche entre branding et entrepreneuriat

Dans le gotha non exhaustif de ces Algériens qui continuent de briller sous le ciel canadien, le nom d’Amokrane Mariche est, incontestablement, aux premières loges. Son profil est hors normes, romanesque. Et pour cause, son curriculum vitae a de quoi impressionner et son parcours de carrière est remarquable et…remarqué. Rencontre avec ce consultant et formateur spécialisé en stratégie de marque.

Comment êtes-vous arrivé à vous spécialiser dans le branding et la communication, après une carrière en journalisme, en cinéma et en marketing omnicanal?

« Il ne faut pas avoir peur de se perdre, c’est ainsi que l’on se retrouve. » Ce proverbe amazigh illustre parfaitement mon cheminement. En tant que journaliste puis en tant que cinéaste documentariste, j’ai découvert le pouvoir des histoires bien racontées, celles qui éclairent, émeuvent et laissent une empreinte. Passer au marketing a été une évolution à la fois bizarre et naturelle : c’était une manière de transformer ces histoires en outils stratégiques de communication pour bâtir des marques.

En arrivant au Canada, j’ai trouvé en LinkedIn une plateforme encore sous-estimée mais puissante. Ce n’est pas qu’un outil, c’est à la fois un média social – qui diffuse des idées – et un réseau social – qui connecte les gens. Comprendre cette dualité m’a permis d’exploiter pleinement son potentiel. J’ai utilisé mes compétences en création vidéo pour me frayer un chemin et me démarquer… C’est ainsi que j’ai fusionné mon expertise en communication et en stratégie marketing pour me spécialiser dans le branding personnel (leadership de marque) et l’utilisation stratégique de LinkedIn comme outil.

Comment votre passage chez Nike en Afrique du Nord vous a aidé à gérer la transition vers votre propre entreprise de coaching et de formation au Canada ?

Nike, ce n’était pas juste une marque, c’était une école de leadership, de discipline et de créativité. Avec Nike, j’ai appris que chaque détail compte pour créer une marque authentique et inspirante. Nous ne vendions pas seulement des chaussures ou des vêtements : nous vendions le dépassement de soi, la persévérance et la foi en ses capacités. C’est l’esprit du #JustDoIt. Ces valeurs sont universelles et applicables bien au-delà du marketing.

Dans le gotha non exhaustif de ces Algériens qui continuent de briller sous le ciel canadien, le nom d’Amokrane Mariche est, incontestablement, aux premières loges.

Lorsque j’ai décidé de créer mon entreprise, cette philosophie m’a guidé. Je savais qu’il fallait non seulement apporter de la valeur à mes clients, mais aussi leur transmettre ces principes : se connaître, se dépasser, et avoir une vision claire de ce que l’on veut bâtir. Mon expérience avec Nike m’a préparé à inspirer et à motiver des individus et des équipes, tout en gardant une approche stratégique. Mes réalisations avec Nike en Algérie comme la course WeRunAlgiers ou l’opération de scouting TheChance continuent encore aujourd’hui sous d’autres formes.

J’ai retenu le meilleur de cette expérience et laissé de côté ce qui ne correspondait plus à mes valeurs.

Comment avez-vous établi votre réseau et trouvé des opportunités au Canada après une riche expérience en Algérie ?

J’aime rappeler dans mes conférences que l’immigration est une forme d’entrepreneuriat en soi. Un mélange d’initiative et de prise de risque calculée. Dans un nouveau pays, bâtir un réseau va bien au-delà d’accumuler des contacts : c’est une démarche humaine, fondée sur l’échange et la collaboration. Il faut d’abord être intéressant avant d’être intéressé.

J’ai donc commencé par m’investir bénévolement dans des initiatives comme LinkedInLocalMontreal, un évènement de réseautage bilingue que j’ai cofondé en 2017. En six ans, nous avons organisé plus de 50 rencontres et presque autant en distanciel (virtuel), en rassemblant des professionnels, entrepreneurs et étudiants issus de milieux divers. En 2019 et 2023, j’ai aussi lancé LinkedInLocalAlgiers pour continuer à connecter les communautés. Aujourd’hui, cette belle communauté LinkedInLocal rassemble plus de 4 000 personnes sur les deux continents. On brise les silos, on connecte les humains, au-delàs des titres ou des secteurs.

 J’ai aussi participé comme bénévole à des projets hyper intéressants comme MTL Connecte du Printemps Numérique que dirige un Algérien au talent exceptionnel : Mehdi Benboubakeur.

Ces initiatives m’ont non seulement aidé à tisser des liens, mais aussi à offrir un espace où les autres pouvaient se rencontrer, échanger des idées et créer des opportunités. Ce sont ces échanges qui donnent tout leur sens au mot « réseau ».

Je dois aussi citer mon expérience professionnelle enrichissante au sein de la Chambre de Commerce du Montréal Métropolitain. C’était ma première et seule expérience en tant qu’employé au Canada avant que je me lance en business. Cet organisme joue un rôle pivotal dans l’écosystème d’affaires au Québec et il m’a aidé à comprendre le marché et ses codes de fonctionnement. J’ai plein de gratitude à mes collègues qui m’ont fait confiance à l’époque et qui continuent à m’encourager encore aujourd’hui.

Quelles ont été vos plus grandes difficultés en tant qu’immigrant, et comment les avez-vous surmontées ?

L’immigration est parfois un mirage,  un rêve chargé d’espoirs, mais la réalité est souvent bien différente. Le processus d’immigration est tellement exigeant et lent que les candidats arrivent épuisés mentalement et parfois financièrement.

Cette euphorie initiale – à la sortie de l’aéroport – est vite remplacée par un choc : il faut s’adapter à une nouvelle culture, reconstruire sa carrière et prouver sa valeur dans un environnement où tout semble différent.

Dans le gotha non exhaustif de ces Algériens qui continuent de briller sous le ciel canadien, le nom d’Amokrane Mariche est, incontestablement, aux premières loges.

Ce qui m’a aidé, c’est d’abord un moment de  réflexion profonde sur ce que je veux être, ce que je veux faire et ce que je veux laisser comme empreinte. Beaucoup ne prennent pas le temps pour ce repositionnement essentiel. Ensuite, j’ai pu trouver des ressources capitales ( les associations d’aides aux nouveaux arrivants) et un mentor qui comprenait à la fois mes aspirations et mon identité. J’ai également appris à rester humble, à ne jamais cesser de me former, et surtout, à bien m’entourer. 

Finalement, à bien y penser, la résilience est une compétence que l’immigration m’a forcé à développer, et elle est devenue un moteur essentiel dans mon parcours. 

Petite anecdote : je demande souvent des rétroactions à mes clients et j’ai remarqué que “Avez-vous une expérience canadienne ?” et “Vous êtes surqualifié !” sont les deux expressions les plus appréhendées, voire détestées, par les nouveaux arrivants. Aujourd’hui, je suis en mission pour que cela ne soit plus un frein.

Les professionnels et les entrepreneurs issus de l’immigration ne sont pas des citoyens de seconde classe. S’ils ont le bon savoir-faire et le bon savoir-être, ils méritent, comme tout le monde, de réussir.

Quelles leçons aimeriez-vous partager avec ceux qui envisagent d’immigrer au Canada ?

Avant toute chose, je poserais cette question : Pourquoi voulez-vous immigrer ? Cette réflexion est cruciale. Immigrer n’est pas une fin en soi ; c’est une étape qui transforme profondément votre vie. Certains créateurs de contenu sur les réseaux sociaux ”vendent beaucoup de vent” comme dit l’adage chez nous, et beaucoup croient que l’herbe est – nécessairement – plus verte ailleurs. L’immigration est bonne si on a les bonnes raisons. Si votre réponse est claire et alignée avec vos valeurs, alors vous serez prêt à affronter les défis.

Je n’ai pas de recette toute faite… mais pour réussir, il est essentiel de se préparer à plusieurs niveaux : mentalement, pour affronter les hauts et les bas ; stratégiquement, en construisant un plan clair pour vos objectifs professionnels ; et humainement, en consolidant votre famille et en vous investissant dans votre réseau. J’aime aussi dire aux nouveaux arrivants qu’il est important de “s’Intégrer sans se désintégrer”. C’est une philosophie que je recommande à tous : conservez vos valeurs, mais restez ouvert à l’apprentissage et au changement.

Vous avez produit et animé un podcast à succès nommé #CaféInLive. Quelle épisode vous a le plus marqué, et pourquoi ?

#CaféInLive a été une aventure extraordinaire : 100 émissions en direct sur les réseaux sociaux, réalisées quotidiennement. C’était un vrai marathon médiatique, mais aussi un moyen de me positionner dans l’écosystème canadien. 

J’ai osé, j’ai pris des risques… Car, chaque entretien était unique : je suis passé de questionner la pharmacovigilance à la nutrition, de la PNL à l’art oratoire. Mon objectif était d’offrir une plateforme aux talents de la diversité pour briller tout en offrant un contenu utile et de qualité à mes auditeurs et abonnés.

Ce qui m’a le plus marqué n’est donc  pas un épisode en particulier, c’est la diversité des expertises que j’ai rencontrées. Ces interviews m’ont poussé à sortir de ma zone de confort, et elles sont restées aujourd’hui alignées avec ma mission : donner la parole à ceux qui ont beaucoup à offrir, mais qui n’ont parfois pas l’espace pour le faire. À travers ces conversations, j’ai pu mettre en lumière des perspectives fascinantes et montrer qu’il existe des talents incroyables issus des communautés éthnoculturelles.

Comment voyez-vous l’évolution des réseaux sociaux et leur impact sur le personal branding ?

Les réseaux sociaux évoluent rapidement, mais ce qui m’intéresse, c’est moins l’outil que l’impact des idées qu’il véhicule. Avec l’émergence de l’intelligence artificielle et des technologies immersives comme la réalité augmentée, les réseaux sociaux deviendront des espaces encore plus interactifs et globaux. Cependant, l’essence du personal branding reste la même : l’authenticité des personnes et leur valeur ajoutée aux autres..

Nous devons apprendre à nous concentrer sur le message, et non sur le bruit des tendances. Ce sont nos idées, nos valeurs et notre capacité à connecter avec les autres qui feront toujours la différence. Les algorithmes peuvent changer mais les bases de la communication humaine restent.

À ce propos, je travaille actuellement sur le lancement du Sommet de l’Impact en Algérie. Au lieu de s’intéresser uniquement aux réseaux sociaux, pourquoi ne pas réfléchir ensemble sur l’impact que ça peut avoir sur notre société, notre économie, nos cultures et notre environnement ? Je suis actuellement en plein montage logistique et financier et toute aide est la bienvenue.

Vous êtes un expert reconnu en branding personnel, comment LinkedIn peut-il être utilisé efficacement ?

LinkedIn n’est pas magique, ce n’est qu’un outil, un plateforme numérique… mais c’est un outil puissant quand on l’utilise stratégiquement. 

La première étape est de comprendre qu’il ne s’agit pas seulement d’un outil pour les RH ou le recrutement. C’est un média social, qui diffuse des idées, et un réseau social, qui connecte des individus. Cette dualité en fait une plateforme unique pour les professionnels.

Beaucoup de personnes consomment les contenus sur cette plateforme mais restent muets. Ils hésitent, se méfient du jugement des autres et peuvent parfois avoir une peur bleue du bouton “publier”. Pourtant, quand on défini un bon positionnement, une cible claire et un calendrier d’actions, tout devient plus simple et les résultats sont garantis

Il est donc crucial de soigner votre profil, mais cela ne suffit pas. Il faut aussi penser à votre réseau, à vos publications, à vos interactions et aux opportunités que vous créez au quotidien. Ceux qui souhaitent rayonner doivent comprendre que tout ce qu’ils font sur LinkedIn – publier, commenter, envoyer des messages – contribue à construire ou détruire leur image. LinkedIn est un levier stratégique pour bâtir une présence forte sans compromettre vos valeurs ni partager votre vie privée comme sur d’autres plateformes.

Pour ceux qui souhaitent aller plus loin, je leur propose de me contacter pour les accompagner dans cette démarche stratégique. 

Quelle place accordez-vous à l’intelligence artificielle et aux nouvelles technologies dans l’entrepreneuriat ?

L’intelligence artificielle et les nouvelles technologies ne sont pas de simples outils, ce sont des catalyseurs de changement. Elles transforment non seulement la manière dont nous créons des marques, mais aussi comment nous interagissons avec elles. Par exemple, l’IA permet de personnaliser les expériences client à une échelle jamais atteinte auparavant, tout en ouvrant de nouvelles perspectives pour les entrepreneurs, même ceux qui démarrent avec peu de moyens. J’ai participé en janvier 2025 comme conférencier à un colloque à Alger sur l’usage de l’IA dans le domaine de la santé et j’étais très agréablement surpris par la qualité des projets.

Cependant, je pense qu’il est essentiel de ne pas devenir esclave de ces technologies. Elles sont là pour amplifier les idées, pas pour les remplacer. Dans mon secteur, une marque forte repose toujours sur une base authentique: des valeurs claires, une histoire sincère, et une vision alignée avec ses actions. L’IA peut optimiser, prédire et automatiser, mais elle ne pourra jamais remplacer la profondeur d’une connexion humaine véritable.

Ces technologies offrent une opportunité incroyable de briser les barrières géographiques et d’accélérer les collaborations, notamment pour les pays Africains. Mais encore faut-il les adopter avec éthique et discernement.

Quels enseignements tirez-vous des défis que vous avez rencontrés en tant que leader communautaire ?

Le leadership n’est pas un titre qu’on s’attribue, mais une reconnaissance accordée par la communauté que l’on sert. Pour tout rêveur comme moi, il est vital de reconnaître ses limites et de s’entourer de personnes talentueuses et alignées avec une vision commune.

Dans le gotha non exhaustif de ces Algériens qui continuent de briller sous le ciel canadien, le nom d’Amokrane Mariche est, incontestablement, aux premières loges.
Amokrane Mariche

Il y a une valeur fondamentale qui guide toutes mes actions : la confiance. Les gens suivent ceux en qui ils peuvent avoir confiance, et cette confiance se construit par des actions alignées. Dans ce domaine, la critique est facile, l’action l’est beaucoup moins. Il faut donc aussi rester focus et aimer le processus.

Ces leçons m’ont permis de créer et de servir des communautés engagées, comme LinkedInLocal ou WeConnectIn, qui ne sont pas seulement des groupes, mais des écosystèmes vivants où chacun peut apporter sa contribution. 

Je suis fier d’être membre du conseil d’administration de la fondation Club Avenir qui est au service de l’excellence maghrébine au Canada depuis plus de deux décennies. C’est un vrai privilège de côtoyer des leaders communautaires comme Taieb Hafsi, Bachir Halimi, Ahmed Aina et l’infatigable président Sofiane Baba ainsi que tous les autres membres et bénévoles.  Je suis aussi aussi admiratif et solidaire avec le travail et les actions stratégiques du CDCA présidé par mon ami Ghani Kolli. On est une grande famille au service des nôtres. Tawa3na comme on dit.

Vous avez participé au African Startup Conférence d’Alger, comment percevez-vous le rôle de la diaspora dans le développement de l’Algérie et de l’Afrique ?

La collaboration sud-sud est une alternative puissante et concrète pour bâtir notre futur commun. Nous, Algériens en particulier, et Africains en général, devons cesser de percevoir simplement nos pays comme pays à fort potentiel ou ressource à exploiter. Nous créons déjà notre futur, et cela se passe maintenant, grâce à l’agilité et la croissance remarquables des PME et start-ups sur le continent.

Cependant, il ne suffit pas d’en parler : il faut des actions concrètes. Cela implique d’améliorer l’environnement administratif, légal et financier, tout en renforçant le secteur de la formation. Ces ajustements sont essentiels pour maximiser les opportunités économiques et sociales. En tant que consultant, conférencier et formateur, j’ai eu l’honneur de collaborer avec des écoles et des incubateurs comme Futuris en Algérie, notamment dans le secteur de l’agritech, pour contribuer à cet écosystème en pleine expansion.

Amokrane Mariche

Les Algériens à l’international, que je préfère appeler « communauté » plutôt que « diaspora », jouent un rôle central dans cette dynamique. Ils apportent des visions nouvelles, des expertises et des investissements. Mais pour que cette contribution soit pleinement effective, il faut aussi adopter une approche humble en revenant au pays. Ce retour doit être perçu comme un échange enrichissant entre ceux qui reviennent et les locaux. Ensemble, nous pouvons bâtir un avenir où chaque talent, local ou international, contribue à un développement durable et inclusif.

Quel message aimeriez-vous adresser à ceux qui envisagent de contribuer à cette nouvelle réalité ?

Le monde change à une vitesse sans précédent, poussé par les avancées technologiques et la mobilité internationale. L’’Algérie se trouve à un tournant décisif. Avec le retour progressif des talents algériens de l’étranger, une nouvelle dynamique s’installe : des expériences internationales enrichissent des secteurs clés comme les start-ups en Agritech, la logistique et toute l’innovation technologique. L’Algérie a les capacités pour s’adapter et prospérer dans cette nouvelle réalité. Les professionnels qui reviennent ne sont pas seulement des contributeurs, mais des catalyseurs de changement, capables de créer des ponts entre l’international et le local. Ce retour, allié aux talents locaux, peut transformer les défis en opportunités et propulser le pays vers un avenir où il joue un rôle actif dans l’économie africaine voire mondiale.

Vos sources d’inspiration et votre créativité ?

Je puise mon inspiration dans ma foi, en particulier dans le concept musulman de Husn Niyah (bonne intention). Chaque action que je pose vise à avoir un impact positif sur moi, mes proches, et le monde qui m’entoure. 

Je crois que, comme l’histoire du colibri dans la légende amazonienne, nous avons tous une contribution, aussi petite soit-elle, à apporter pour rendre ce monde meilleur. 

Mes parents sont aussi mes modèles premiers. Je peux lire et m’inspirer des plus grands de ce monde… mais personne ne m’a aussi marqué que Yema et Vava. Qu’Allah les bénisse. 

Le café joue aussi un rôle important dans ma vie : chaque double espresso est un moment de réflexion, une pause nécessaire pour recharger ma créativité. (rires)

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